TUE, 17/11/2021, T538/20
M. G. P. v. Napkings et EUIPO
Lien vers la décision (URL) :
https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=249406&pageIndex=0&doclang=FR&mode=req&dir=&occ=first&part=1&cid=4598325Apport de la décision :
Le TUE rappelle qu’un dessin ou modèle est réputé avoir été divulgué au public s’il a été publié avant la date de dépôt de la demande d’enregistrement (ou, si une priorité est revendiquée, avant la date de priorité), « sauf si ces faits, dans la pratique normale des affaires, ne pouvaient raisonnablement être connus des milieux spécialisés du secteur industriel concerné, opérant dans l’Union ».
Il rappelle que l’appréciation de cette connaissance des milieux intéressés dépend des circonstances propres à chaque affaire.
En l’espèce, un livre, ayant trait au domaine concerné par le dessin et modèle contesté, publié aux USA, pour la première fois en 1945 et disponible sur une plateforme en ligne (bien que la preuve de la disponibilité du livre sur la plateforme soit postérieure à l’enregistrement du modèle) permet de considérer que le dessin ou modèle antérieur pouvait être raisonnablement connu des milieux spécialisés du secteur concerné opérant dans l’Union antérieurement à la date d’enregistrement du dessin ou modèle contesté.
Images de l'art antérieur :
- dessin d’une serviette de table qui apparaît dans la publication The Classics of Magic, de Tom Osborne, Napkin Folding, divulguée antérieurement
Images du modèle invoqué / dont la validité est en jeu :
- Dessin ou modèle communautaire numéro 650627-0003 (« Tissus pour nettoyer, linge de table »)
Texte (ou extrait) de la décision :
« À cet égard, il convient de constater, en premier lieu, que la publication du livre The Classics of Magic, de Tom Osborne, Napkin Folding, constitue un élément concret et objectif, au sens de la jurisprudence rappelée au point 31 ci-dessus. En outre, la chambre de recours n’a pas commis d’erreur d’appréciation en considérant, au point 33 de la décision attaquée, que des livres publiés aux États-Unis sont communément lus dans l’Union, l’anglais étant la langue officielle de plusieurs États membres et, d’une manière générale, largement parlé dans l’Union, et donc que la divulgation au sein de l’Union de cet ouvrage pouvait être tenue pour établie.
Par ailleurs, c’est à juste titre que la chambre de recours a retenu, au point 33 de la décision attaquée, que le fait que les preuves de la disponibilité de ce livre sur Internet, via le site de vente en ligne de l’entreprise Amazon, étaient postérieures à la date d’enregistrement du dessin ou modèle contesté ne saurait, en soi, permettre d’exclure une diffusion par Internet (par exemple par l’intermédiaire d’autres sites) antérieure à cette date, compte tenu de l’époque de publication dudit livre (et d’octroi du droit d’auteur sous l’empire du US Copyright Act de 1909), à savoir 1945. L’EUIPO a confirmé lors de l’audience que ledit livre est toujours en vente sur le marché.
En deuxième lieu, malgré son titre et le fait que son auteur était un magicien, il ressort du contenu dudit livre que celui-ci est effectivement consacré exclusivement aux différentes manières de plier des serviettes, lesquelles constituent les produits concernés par le dessin ou modèle contesté.
En outre, force est de constater, comme le souligne à juste titre l’intervenante, que l’auteur de ce livre présente le dessin ou modèle antérieur comme étant la manière la plus habituelle et notoire de représenter une serviette de table ainsi que les différentes manières de plier des serviettes se trouvant déjà dans le domaine public. Il y a donc lieu d’écarter l’allégation selon laquelle les professionnels du secteur concerné, à savoir le secteur du linge de table, n’auraient pu avoir connaissance de ce dessin que par hasard.
Par ailleurs, cette constatation n’est pas affectée par l’argument du requérant tiré de la catégorisation subjective du livre en question sur le site de vente en ligne de l’entreprise Amazon. Or, contrairement à ce que soutient le requérant, cette catégorisation, qui n’a pas valeur de référence en matière de classification de produits, ne saurait être considérée comme un élément susceptible de démontrer que les milieux spécialisés du secteur concerné ne pouvaient pas raisonnablement avoir eu connaissance du dessin ou modèle antérieur sinon par hasard.
Dans ces conditions, il y a lieu de constater, contrairement à ce qu’allègue le requérant, que c’est à juste titre que la chambre de recours a considéré que le dessin ou modèle antérieur pouvait être raisonnablement connu des milieux spécialisés du secteur concerné opérant dans l’Union antérieurement à la date d’enregistrement du dessin ou modèle contesté ».


