SKECHERS USA FRANCE / IM PRODUCTION, EUIPO Chambres de Recours, 3e Chambre, 27 octobre 2015, R 2427/2013-3, Décision Chaussures baskets compensées Isabel Marant

EUIPO Chambre de recours (3e Chambre), 27/10/2015, R 2427/2013-3
SKECHERS / IM PRODUCTION (Isabelle Marant)

Lien vers la décision (URL) :

https://euipo.europa.eu/eSearchCLW/#basic/*///number/R2427%2F2013-3

Apport de la décision :

La 3e Chambre de Recours vient, dans une affaire où la société IM PRODUCTION invoquait deux de ses modèles déposés respectivement en juin et décembre 2010, préciser la notion d’auto-divulgation qui permet à un déposant de modèle de divulguer son produit sur le marché communautaire dans les 12 mois précédant son dépôt comme modèle sans qu’en soient détruits la nouveauté et le caractère individuel .

La Chambre rappelle que :

  1. L’objectif du « système de protection des dessins et modèles communautaires tel que déclaré au considérant 7 du RDMC, est de « favoriser l’innovation et le développement de nouveaux produits».

Un produit qui a déjà été « publié », « exposé » ou « utilisé dans le commerce », même par le          déposant, n’est donc « plus une innovation puisqu’il est déjà connu, et ne mérite, donc, l’octroi d’aucun droit exclusif. »

  1. Une exception existe toutefois permettant « pour le designer, de tester le produit sur le marché – à savoir le « publier, exposer ou utiliser dans le commerce » – avant de l’enregistrer comme modèle communautaire, sans que cette divulgation lui soit préjudiciable.

C’est précisément l’idée qu’exprime le considérant 20 du RDMC et que codifie le paragraphe 2 de l’article 7 du RDMC, au titre duquel la nouveauté ou le caractère individuel d’un modèle communautaire n’est pas détruit par une divulgation effectuée par le designer lui-même dans les douze mois qui précèdent le dépôt. »

La décision indique cependant que, selon elle, cette exception doit être d’interprétation stricte en tenant compte de sa finalité qui est de « tester durant un temps limité, le produit, dans lequel le modèle à protéger est incorporé, sur le marché. Tester le produit sur le marché signifie le présenter au public afin de mesurer les chances de succès commercial et déterminer l’utilité de le protéger par un enregistrement communautaire« .

Dans cette affaire la chambre précise donc la notion d’auto-divulgation non-opposable ou opposable et considère de façon différente la divulgation par mise sur le marché de celle qui résulte d’un dépôt antérieur dont le dépôt second ne serait qu’une version « modernisée ».

Selon elle, la publication dans le Bulletin des dessins et modèles communautaires du modèle antérieur invoqué, n’était « aucunement destinée à un but promotionnel, c’est-à-dire effectuée pour tester la chaussure sur le marché. Il s’agit, en effet, d’une publication de nature exclusivement administrative » et elle « ne peut être couverte par l’exception décrite au paragraphe 2 de l’article 7 du RDMC « .

La publication en août 2010 du modèle 001 221 584-0023 déposé le 22 juin 2010 et appartenant à IM PRODUCTION a été donc considérée comme une antériorité opposable faisant échec à la nouveauté et au caractère individuel du modèle second 001 252 266-0025 déposé en décembre 2010 par la même société IM PRODUCTION ; ce modèle second ne se distinguant pas du 1er et produisant la même impression globale d’ensemble, il a été annulé.

 


Produits concernés : Chaussures (baskets montantes compensées)

Images de l'art antérieur :

Images du modèle invoqué / dont la validité est en jeu :

Décision parue ou commentée dans :

http://pmdm.fr/wp/2016/05/autodivulgation-quand-la-troisieme-chambre-de-recours-de-leuipo-reecrit-larticle-7-2-du-reglement-sur-les-dessins-modeles-communautaires/

 

http://lauremarino.blogspot.com/2016/10/isabel-marant-c-mango-contrefacon-de.html


Texte (ou extrait) de la décision :

Il convient de rappeler qu’au soutien de sa demande, la demanderesse en nullité avait invoqué plusieurs modèles divulgués avant la date de dépôt du modèle attaqué.

Parmi ces modèles antérieurs figurait un modèle de chaussure, enregistré et publié comme modèle communautaire (numéro 1 221 584-0023) par la titulaire elle-même.

La demanderesse en nullité fait valoir que la division d’annulation ne lui a pas permis de présenter ses observations au sujet de la question de savoir si la divulgation du modèle antérieur numéro 1 221 584-0023 pouvait être opposée à la titulaire.

La Chambre indique que : En excluant le modèle numéro 1 221 584-0023, la division d’annulation a fait une application erronée de l’article 7, paragraphe 2 du RDMC. Le but recherché par cet article est de permettre au designer de tester son modèle sur le marché (pendant une période, dite de grâce, de 12 mois au maximum) avant de l’enregistrer. L’interprétation qu’a fait la division d’annulation de cet article en méconnaît la finalité et porte au résultat, absurde, de consentir à la titulaire de prolonger artificiellement la durée de protection de son modèle au moyen d’un dépôt, dans la période de grâce, d’un modèle similaire ; la divulgation du modèle en question aurait donc dû être prise en considération pour évaluer la nouveauté et le caractère individuel du modèle contesté.

De l’avis de la chambre, la publication sur laquelle s’appuie la titulaire, à savoir la publication du modèle numéro 1 221 584-0023 dans le Bulletin des dessins et modèles communautaires, n’est aucunement destinée à un but promotionnel, c’est-à-dire effectuée pour tester la chaussure sur le marché. Il s’agit, en effet, d’une publication de nature exclusivement administrative, rendue nécessaire par l’article 14 du REDMC, qui fait suite à une demande d’enregistrement.

Cette publication, en raison du fait que sa finalité n’est manifestement pas de « tester le produit sur le marché », ne peut être couverte par l’exception décrite au paragraphe 2 de l’article 7 du RDMC et doit, au contraire, être prise en compte dans le cadre de la règle générale établie au paragraphe 1 de
l’article 7 du RDMC.

La publication dudit modèle dans le Bulletin représente donc, comme l’affirme la demanderesse en nullité, une divulgation dont il faut tenir compte dans l’appréciation de la nouveauté et du caractère individuel du modèle contesté.

Les deux modèles montrent une chaussure sportive haute, du genre communément appelé « basket », vue selon différentes perspectives d’observation. La position des bandes de fermeture « velcro » montre que le
modèle contesté représente une chaussure pour le pied gauche alors que le modèle antérieur représente une chaussure pour le pied droit.

Les deux modèles produisent, même pour une utilisatrice avertie vigilante, la même impression d’une chaussure sportive rondelette et rembourrée. Le modèle contesté est donc dépourvu de caractère individuel par rapport au modèle antérieur.

1. La décision attaquée rendue le 20 novembre 2013 par la division d’annulation, et qui avait rejeté la demande en nullité du modèle comme infondée, est annulée ;
2. Le modèle contesté 001 252 266-0025 est déclaré nul.

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